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La femme et le dixième commandement

« La propriété, c’est le vol » écrivait Proudhon (1) . Donc, l’impôt sur la propriété serait une sorte d’amende (honorable) pour se faire pardonner le méfait. L’État serait en quelque sorte le confesseur (les déclarations de revenus et de propriété étant en fait des mea culpa).


(1) Encore une fois l’intelligence superficielle (IS) revoit et corrige les textes de Maeva, les rend compréhensibles, compte tenu de la propension de l’auteure à se croire supérieure à tout un chacun.

Bien sûr, Maeva fait semblant de se mettre à la portée de ses lectrices et lecteurs qui ne connaissent de Proudhon (1809-1865) que cette phrase lapidaire, oubliant que celui qu’on considère comme le père de l’anarchisme ne critiquait que ceux qui tirent un revenu du travail des autres alors qu’eux-mêmes avaient un poil dans la paume.


La Déclarations des droits de l’homme et du citoyen de 1789 affirmait exactement le contraire en son article 17 : « la propriété est un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être dessaisi… ». J’ai mis des pointillés car la Déclaration prévoit des exceptions, par exemple s’il faut élargir les routes ou en construire des nouvelles si la nécessité en est avérée, bien sûr « moyennant une juste et préalable indemnité ». Me voilà rassurée. Si la nécessité publique fait désormais que la troisième voie de circulation passe sous la fenêtre de mon salon, j’aurai de quoi m’acheter des boules Quies jusqu’à la fin des mes jours et des stilnox jusqu’à la fin de mes nuits. L’article 17 n’a pas empêché que les Gouvernements taxent les propriétaires comme indiqué ci-dessus. De toute façon, pour trouver de l’argent, il faut bien le prendre là où il est, même si l’Évangile assure « qu’à ceux qui n’ont rien, on prendra même ce qu’ils ont » (2) . Surtout, n’allez pas raconter ça aux ministres des finances qui trouveraient ainsi des « niches fiscales » là où le commun des mortels n’imaginerait pas qu’il y en eût.


(2) L’IS a vérifié que cette phrase figure bien dans la Bible : les quatre Évangiles la mentionnent dont Luc, chapitre 19, verset 26.


Puisque j’ai évoqué la culture biblique, je voudrais vous exposer ma perplexité sur le fameux Décalogue ou les Dix Commandements. Décalogue, ça me fait penser à décaféiné, décadence, décathlon (qui va s’installer bientôt à Tahiti, magasin spécialisé dans la lutte contre l’obésité) ou décamètre… Ce serait bien d’en trouver dix comme ça.

Oui, perplexité car parmi les dix injonctions de Dieu le Père, il y en a de bien drôles.

Ainsi, il nous est ordonné de ne pas travailler un jour sur sept, parce qu’au bout de six jours de turbin, le Créateur se sentit las (prononcez lasse). Mais s’il connaissait les cadences, d’aujourd’hui (voyez par exemple au Fare Rata), Dieu aurait fait des semaines de cinq jours, le cinquième étant évidemment chômé. Et pour les jours chômés, il faudrait préparer votre


la veille au soir et faire votre vaisselle le jour d’après !

Tenez-vous bien, le quatrième commandement vous ordonne, le jour du repos, de donner congé à l’immigré qui bosse pour vous. Au moins, j’apprécie ce Dieu qui donne aux immigrés les mêmes droits qu’aux citoyens. Mais au fond, je savais depuis longtemps que Dieu n’était pas inscrit au Rassemblement national…

Nous sommes aussi priés d’honorer notre père et notre mère, mais pour une bonne raison, c’est qu’en la circonstance le Père éternel nous garantirait à nous une longue vie. J’aurais aimé qu’Il demandât aux pères de respecter leurs filles (voire leur fils) afin de les mettre à l’abri de l’inceste par exemple. Ce serait demander beaucoup au « grand sculpteur » qui estima avoir créé l’homme à son image.

Le deuxième donne une curieuse idée d’un Dieu d’amour dont on nous parle à l’école du dimanche ou au catéchisme. Ainsi Dieu déclare-t-il : « chez ceux qui me haïssent, je punis la faute des pères sur les fils, jusqu’à la troisième et la quatrième génération ». Aujourd’hui, devant un tribunal, il serait condamné pour cruauté et harcèlement envers des innocents.

Le plus étonnant de tous c’est le dixième commandement qui se fait le défenseur de la propriété : « tu ne convoiteras pas la maison de ton voisin, ni rien de ce qui lui appartient ». J’ajouterais volontiers « quelque fût le moyen par lequel il s’accaparât lesdits biens » (bien dit, non ?). Là où les femmes devraient s’offusquer, c’est lorsque le texte évoque ce qui appartient à l’homme, par exemple, son bœuf, son âne, sa maison… mais aussi sa femme. La femme n’est qu’un élément du patrimoine, la femme appartiendrait donc à l’homme ! Féministes de tous les pays, unissez-vous ! Bien évidemment, je ne confonds pas féministes et castratrices (toutes celles qui ne sont pas fanatiques de Sandrine Rousseau me comprendront).

De plus, je ne suis pas sûre que vous connaissiez le dixième commandement en entier. Il recèle des « trésors » ou des « horreurs », c’est selon. Voyez plutôt : « Tu ne convoiteras pas la femme de ton voisin ». Admettons que Dieu était pour la paix des ménages ! Mais quel macho, quand même ! Et les femmes, alors, était-il inconcevable, qu’il leur arrivât de convoiter le mari de la voisine ? Je vous avoue qu’au moins une fois dans ma courte existence, j’ai reluqué mon voisin, beau surfeur musclé et hâlé perpétuel. Certes, j’avais une excuse aux yeux des églises, le tane en question n’était qu’un concubin, pas même déclaré en mairie… Un jour, le surfeur en question, dont je n’avais finalement qu’une « vague » idée, colla une tannée (3) à ma voisine. Je fus dégoûté par ce goujat gougnafier. Mais bon Dieu, pourquoi le Créateur se plaçait-il seulement du côté des mecs ? Sans doute parce que dans son esprit, la femme n’avait pas droit à la convoitise, ou si elle en éprouvait, elle méritait le châtiment. D’ailleurs, dans certains pays et à certaines époques, on lapidait la femme adultère et pas l’homme délétère… Ah ! que j’aime Brassens quand il chante : « ne jetez pas la pierre à la femme adultère, je suis derrière… », au nom de toutes les miennes. Mais le rédacteur des Dix Commandements révélait son machisme ! Et je n’ai pas tout dit !


(3) Ô indécrottable Maeva qui joue sur les mots… Le tane inflige des tannées à sa vahine. J’aurais préféré qu’elle écrivît que le tane la tabassait, ça faisait plus ma’ohi…


Certes, ce rédacteur considéra que puisque tu ne pouvais pas convoiter la femme de ton voisin (dans certains cas, d’aucuns sont plus enclins à convoiter que d’autres, ça c’est certain ! Mes amis économistes diraient que cela dépend de l’offre), tu ne devrais pas non plus convoiter « ni son serviteur, ni sa servante ». On aurait pu ajouter « ni sa jeune fille au pair »… Enfin, c’est bien d’avoir protégé la servante de la convoitise du voisin, mais rien n’est dit sur la convoitise du maître à l’égard de la servante. J’avais appris naguère dans les rudiments de latin qu’on évoquait les « amours ancillaires » (pratiquées parfois en silo) pour les relations charnelles, volontaires ou non, entre le maître et sa domestique quand la domotique n’existait pas encore.

Attendez, je n’ai pas fini. La liste des exclusions des convoitises se poursuit dans le texte sacré (sacré texte même puisque la place de l’adjectif en dit long sur la valeur du mot !) : « [tu ne convoiteras pas] ni son boeuf, ni son âne »… Aujourd’hui on écrirait sûrement : « ni son tracteur, ni sa porsche ». Alors, je veux bien que la féministe que je suis, concède qu’il y a comme une liste à la Prévert doublée d’une hiérarchie : la femme, le serviteur, la servante, le bœuf, l’âne… ». Mais quand même ! La femme et l’âne dans la même opprobre (et au figuré) c’est un peu trop désinvolte pour moi.

Je veux bien qu’on invoque l’âge du texte biblique, mais si mon voisin me convoitait moi (ce que je comprends et lui pardonne déjà) et ma bicyclette électrique, j’aimerais qu’il me dise clairement que je compte plus, beaucoup plus que mon vélo, sinon je lui crèverais les pneus de son SUV.


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